Biographie

Le révélateur
La photographie, comme d'autres formes d'art, est liée à un épisode de vie ou bien à une rencontre.
Pour moi, la photographie est entrée dans ma vie à l'âge de 16 ans par une rencontre, avec un personnage digne d'un personnage des romans de Pagnol
claude était son nom.
Il était mon maitre d'apprentissage lorsque je fis mon entrée en cuisine, mais il fut bien plus que cela pour le jeune réservé que j'étais qui découvrait la "vraie" vie déployant ses ailes, sans aucun repère ni cadre.
pendant toute mon enfance j'avais été un enfant timide, sensible voire brimé mais aussi habité d'une grande curiosité, d'une capacité d'émerveillement, s'échappant d'un monde peu heureux pour moi à travers la littérature. J'y trouvais le moyen de vivre avec mes émotions débordantes à travers des histoires que je vivais comme les miennes, avec des mots qui n'étaient pas les miens mais que je m'appropriais
Je découvrais du haut de mes seize ans, avec mon apprentissage en cuisine, le travail aux horaires tardives, voire nocturnes. Une vie bien différente des lycéens de mon âge s'ouvrait à moi et une fois quitté la cuisine je découvrais une vie parisienne nocturne avec ses personnages atypiques et ses lieux underground.
Ce que mon imagination avait caressée dans les pages des romans que j'avais tourné seul dans ma chambre était en train de prendre vie devant mes yeux ébahis. D'une certaine manière, je mépanouissait en empruntant des chemins de traverses tout feu tout flamme, mon âme jaillssant du plus profond de moi tel un feu d'artifice.
Claude, mon maitre d'apprentissage était là pour moi, comme un père de substitution, calmant mon agitation, échangeant avec moi sur les choses de la vie et accueillant mes péripéties nocturnes et écoutant mes états-d'âmes.
Un vrai personnage de roman disais-je, avec une barbe blanche aussi longue que ses cheveux de la même couleur et qui lui tombaient sur les épaules. IL cuisinait sans toque, une clope à la bouche, me parlait avec bienveillance et sourire mais jamais avec autorité. Les mots qu'il empruntait pour me parler étaient entre le français et le patois marseillais, d'où venait ses racines.
Là aussi, à ses côtés je vivais les pages d'un roman qui se tournaient jour après jour et j'en suis d'autant plus conscient aujourd'hui avec mon âge et mon regard sur ma vie. Il lavait mes tenues de cuisine dans un grand faitout d'eau bouillante, me tendait un petit verre de ricard lorsque j'avais mal au ventre, se tenait au courant de mes flirts... Un papa poule de substitution, nourrissant aussi mon esprit, ma reflexion ainsi que ma culture générale à travers de si nombreuses anecdotes.
CLaude et son accent marseillais si prononcé rayonnait dans la capitale au milieu de toute cette grisaille. Un jour, il vint vers moi et me fit l'invitation de venir passer le week-end chez lui, dans sa petite maison en banlieue, ce que j'acceptais sans même réfléchir me sentant tellement honoré de sa proposition. Quelqu'un s'occupait de moi, se souciait de moi, s'intéressait à moi.
Il sentait, je m'en aperçois aujourd'hui, que j'avais besoin d'un cadre, d'un soutien, d'une écoute.
Lorsque j'arrivais chez lui, la petite maison de banlieue était toute à son image, une vieille bâtisse aux murs défraichis, avec ses chats gros comme des chiens qui l'avaient obligé à mettre, je m'en souviens encore, une pédale à la porte de son frigo pour éviter à ses fauves de se servir eux-mêmes à son insu. Tout un roman...
Ce week-end fût rempli de riches échanges et non de leçons de vie, comme il savait si bien le faire et de manière tellement unique, je m'en aperçois aujourd'hui. Le week-end passa et au moment de partir, comme un point d'orgue, comme si tout ce week-end n'avait attendu que ce moment, claude me dit: "il y a quelque chose sur le buffet pour toi, je pense que ca te fera du bien".
Il s'agissait d'un appareil photo, mon premier appareil photo, un "vrai"!!!!
Son intuition fût parfaite, car depuis ce jou-là, comme un écrivain couche ses souvenirs, ses madeleines de Proust, ses émotions sur des pages blanches, moi, depuis, je l'imite mais sur la pellicule, m'affranchissant des mots et laissant mon âme s'y déposer.
Aujourd'hui mon appareil est devenu mon ami fidèle, mon compagnon intime.
Je ne saurai jamais suffisament remercier Claude de ce présent et de toute l'importance qu'ils on pris, lui et la photographie pour tout ce qu'ils m'ont apportés dans ma vie.